Des déclinaisons de vert, verdure, verres
et couleurs
LE MONDE | 08.04.04
Voici les grandes lignes des quatre projets concernant le quartier des
Halles, dont l'un doit être choisi en juin (Le Monde du 8 avril et
du 23
février).
MVRDV-Winy Maas.
Les Néerlandais de MVRDV proposent, avec l'architecte Winy Maas, un
plancher de verre, véritable vitrail qui recouvre, avec un jardin,
les
5,5 hectares du cour de la capitale. Ce toit, en partie transparent,
permet de créer sur un seul niveau plus de 40 000 m2 de surfaces
d'activités et toute une trame de rues couvertes.
On accède à ce "podium" de 4 mètres de haut
depuis les rues par des
rampes et des escaliers ; depuis les niveaux souterrains, par des
escalators ou des ascenseurs. Cette "vallée de verre et de vert" devient
le "monument" demandé par la Ville. Le "jardin poétique" est
divisé en
espaces thématiques. Il comprend un bois, des pelouses, un labyrinthe,
un jardin d'enfants, des jeux de boules, une orangerie, un skate parc,
un "coussin d'herbes", une "pelouse rosée"...
Des "boulevards flâneurs"
réunifient le secteur et créent de nouveaux liens avec les
quartiers
voisins. Un nouveau marché alimentaire rue des Halles communique avec
la
rue commerçante Montorgueil.
Le toit, mosaïque de verres de couleurs sur 40 % de sa surface, éclaire
un niveau en rez-de-chaussée qui accueille les activités et
les
équipements des pavillons Willerval d'aujourd'hui, ainsi que des
nouveaux commerces. Toutes les façades extérieures s'ouvrent
sur les
ruelles adjacentes.
Tous les niveaux inférieurs sont éclairés par la lumière
naturelle qui
traverse le vitrail. Les circulations entre étages se font par des
passerelles, depuis lesquelles les commerces et les équipements sont
visibles. Les activités marchandes, culturelles et sportives sont
réorganisées et regroupées suivant des noyaux thématiques.
Même la gare RER, rebaptisée "cathédrale",
est éclairée par le jour
jusqu'à 35 mètres de profondeur. Un accès unique mais
considérablement
élargi conduit à la salle d'échanges. On accède aux
quais depuis des
passerelles surplombant les rails. Un nouveau passage est ouvert pour
les passagers des RER au niveau - 6 vers les lignes de métro. MVRDV
imagine une connexion avec les TGV.
Seura-David Mangin.
Le projet de cette équipe traite presque exclusivement l'espace entre
le
Forum et la Bourse de commerce. Ce bâtiment devient le lieu emblématique
du quartier avec un centre du design et de la mode ainsi qu'une
Université de tous les savoirs. Un auditorium est aménagé dans
les
sous-sols et un restaurant panoramique prend place sous la coupole. Le
jardin des Halles est recomposé en trois ensembles. Des pelouses et
des
"salons de verdure" au nord, vers Saint-Eustache. Des bandes de jeux,
de
promenades, de parterres et de kiosques le long de la rue Berger. Au
centre, un cours de 22 mètres de large permet la déambulation
entre la
Bourse et la rue Pierre-Lescot après avoir "enjambé" le
Forum.
Le carreau des Halles, de 145 mètres de côté, abrite
ce passage couvert.
Situé à 9 mètres de hauteur, le toit constitue "un
toit dans un jardin".
D'une épaisseur de 2 mètres, il est constitué d'une
structure en
caissons, pour la plupart vitrés ou ajourés, couverts de cuivre
patiné
de couleur verte. Il filtre la lumière et scintille la nuit, devenant
ainsi "une cinquième façade horizontale" pour les
riverains et les
visiteurs des terrasses panoramiques de la Bourse et du centre
Beaubourg.
Les deux niveaux des ailes latérales du carreau accueillent équipements
publics et nouveaux commerces sur 19 000 m2 ; une surface augmentée
globalement de 15 000 m2, dont une partie récupérée
sur la voirie
souterraine centrale. Grâce à la suppression de celle-ci, les
continuités urbaines sont rétablies pour les piétons,
du nord au sud.
Des accès spacieux offrent une meilleure "lisibilité" du
Forum et des
gares des RER et du métro.
La lumière naturelle arrive jusqu'au niveau - 4 depuis la place basse,
ouverte sur toute sa hauteur. La salle d'échanges du RER est
restructurée en balcons vers les quais, permettant aux voyageurs de
s'orienter sur chaque palier, aussi bien vers les différentes lignes
de
transports publics que vers la surface.
OMA-Rem Koolhaas.
Ce n'est pas un mais vingt monuments emblématiques de la rénovation
du
quartier que proposent l'équipe néerlandaise OMA et Rem Koolhaas.
D'étonnants objets de verre de couleur, aux allures de puits de pétrole
ou de flacons de parfum, atteindront 25 mètres de haut pour la plupart,
et 37 mètres (le niveau maximal autorisé à Paris) pour
la plus grande.
Elles dominent un jardin de 7 hectares.
Ces tours dégagent des points de vue et des perspectives de toutes
parts
et à tous les niveaux, en particulier vers l'église Saint-Eustache
et
dans l'axe des rues existantes. De volumes différents, les pavillons
comptent moins de 20 000 m2 au total. Leurs premiers niveaux
communiquent avec les espaces souterrains. Cette composition de volumes
et de vides est déchirée en surface par des tranchées
et une gigantesque
faille comme un canyon. C'est par celle-ci, au pied de la plus haute
"tour", qu'arriveront les voyageurs.
Cette galerie à ciel ouvert communique avec les rues et le jardin,
répondant ainsi à l'un des points essentiels du cahier des
charges :
l'amélioration de l'évacuation du centre commercial et de la
gare
souterraine. Tout un système de voiries émerge en surface :
un atrium
s'ouvre au croisement des rues de Rivoli et des Halles.
Des rues piétonnes traversent le jardin, formé de cellules
arrondies de
dimensions très différentes. On y trouve le "cercle des
jardiniers", des
"plages vertes" pouvant accueillir des événements comme
du cinéma en
plein air, un "jardin d'humidité", le "gouffre jardin" qui
marque
l'entrée de la rue Pierre-Lescot... Une "vague d'arbres" est
plantée de
manière libre dans les rues d'alentour, et sert de liaison avec la
rue
de Rivoli. Le quartier des Halles aurait alors pour vocation d'insuffler
un esprit de liberté et de création à tout le centre
de Paris.
L'Atelier Jean Nouvel.
Ce projet recompose le quartier à la manière du Palais-Royal,
entourant
le jardin par des immeubles bas. Des alignements de grands arbres
relient la rue de Valois au boulevard de Sébastopol, lui-même
enjambé
par une passerelle de bouquinistes. La surface du jardin passe de 4
hectares à près de 7 : une succession de parcs à thèmes
sur un balcon
face à l'église Saint-Eustache et surtout 7 000 m2 de nouvelles
plantations et une piscine en plein ciel, sur le toit du "carreau des
Halles", à 27 mètres de hauteur.
Ce carreau accueille une "place des Images", des commerces et des
espaces d'activités. Son plafond est constitué de miroirs gris
ou de
verrières couvertes de 20 cm d'eau. Ses cloisons sont transparentes
ou
"végétalisées". Tous les accès de la gare
souterraine sont signalés par
des mâts. Un nouvel immeuble, promis à la RATP, construit à l'angle
des
rues de Rivoli et des Halles, regroupe les entrées des lignes de métro
et des RER.
La Bourse de commerce est occupée par un hôtel de luxe de 137
chambres.
Les bureaux de la chambre de commerce et d'industrie sont transférés
dans deux immeubles le long de la rue Berger. Jean Nouvel propose 62 000
nouveaux mètres carrés en surface, presque autant que la totalité des
commerces actuels en souterrain. D'autres bâtiments accueillent le
Pavillon des arts, une bibliothèque, des pépinières
d'entreprises, des
bars et des restaurants, etc.
Autour du parvis de Saint-Eustache, une halle abrite un marché
alimentaire. Les marchands de fleurs s'installent autour de la fontaine
des Innocents. Le Conservatoire, dans un nouvel immeuble à
l'architecture de bois, "dialogue à coups de vitraux" avec
Saint-Eustache et communique avec la Médiathèque musicale de
Paris, en
sous-sol.
Christophe de Chenay
ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 09.04.04