L’Humanité (24/12/04)

 

Journal l'Humanité
Rubrique Ile de France
Article paru dans l'édition du 24 décembre 2004.

Île-de-france

Un projet très parisien

L’annonce par le maire de Paris, mercredi 15 décembre, du lauréat du marché de définition du réaménagement des Halles n’a finalement provoqué aucune polémique d’envergure. La vocation nationale et internationale du projet, tant par la dimension capitale de ce quartier central de Paris que par les candidatures de quatre stars mondiales de l’architecture, a été réduite à un seul projet, qui sera coordonné par David Mangin. Le choix minimaliste de la commission d’appel d’offres et tranché par Bertrand Delanoë en dit long sur la conscience d’une population parisienne et de celle de ses élus. Il est évident que le maire de la capitale qui, en d’autres circonstances (les tours par exemple), avait affirmé des intentions architecturales plus novatrices, n’a pas souhaité cette fois entrer en conflit avec ceux qu’il considère comme ses partenaires privilégiés, les Verts. Ceux-ci adeptes d’un urbanisme adouci, défenseurs du patrimoine favorisent une politique à tendance frileuse, qui tend à enfermer Paris et ses habitants entre leurs murs, à l’encontre de la volonté de la majorité municipale qui au contraire établit depuis trois ans de nouveaux rapports de coopération avec les communes riveraines.

Dans ce contexte, le sort du quartier des Halles peut-il dépendre d’abord des riverains du 1er arrondissement et des commerçants du Forum ? Ceux-ci en tout cas ont constamment affiché leur préférence pour le projet Mangin. Ils ont toujours trouvé une oreille attentive au sein de l’exécutif municipal avec les Verts qui ont, eux aussi, affirmé très tôt leur préférence pour le projet Mangin. L’architecte choisi le 15 décembre ne pourra même pas réaliser l’ensemble de son projet puisque la dalle qui doit couvrir le Forum fera l’objet d’un concours international. Le choix Mangin ne heurtera pas les électeurs des Verts, ni même les centaines de milliers de banlieusards qui fréquentent quotidiennement la plus grande gare européenne en sous-sol, banlieusards qui n’ont guère participé au processus de concertation. Ils ont estimé, à tort peut-être, qu’on ne les y avait pas conviés.

Bertrand Delanoë a justifié le choix du projet de David Mangin qui réinsère les Halles dans le « corps de Paris », restaure la perspective, redonne de l’espace à l’ensemble du secteur. C’est, dit le maire, « un vrai choix urbanistique du XXIe siècle ». Le jardin appelé à devenir un « jardin d’art paysager contemporain » se trouve privilégié puisque la dalle fera l’objet d’un nouveau concours, pour faire naître une nouvelle « oeuvre d’art ». « Nous faisons aujourd’hui des choix d’orientation. Nous allons ainsi pouvoir prendre des décisions mûrement réfléchies. Et chacun sera invité à donner son point de vue », a conclu Bertrand Delanoë le 15 décembre. Car, conscient que le choix est éminemment politique, il prend acte de la diversité des points de vue au sein de la majorité municipale, y compris au sein du groupe des Verts, où Christophe Girard, adjoint chargé de la culture, a rappelé sa préférence pour le projet de l’architecte hollandais Koolhaas, Yves Contassot, adjoint chargé de l’environnement, évoquant pour sa part « un choix par défaut ». Le groupe communiste avait franchement opté pour le projet Koolhaas, qui « offre les possibilités les plus fortes, les plus innovantes, les plus porteuses d’avenir », comme le déclarait au Conseil de Paris, en juin dernier, Jean Vuillermoz, au nom du groupe. Le réaménagement des Halles est à inventer. J. M.